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Auction archive: Lot number 52

GANCE (Abel). Lettre autographe signée à Éli...

Estimate
n. a.
Price realised:
€1,100
ca. US$1,282
Auction archive: Lot number 52

GANCE (Abel). Lettre autographe signée à Éli...

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n. a.
Price realised:
€1,100
ca. US$1,282
Beschreibung:

GANCE (Abel). Lettre autographe signée à Élie Faure. Beauvallon (Var), 20 septembre 1927. 4 pp. in‑folio, bas de page imprimé à son adresse de l'avenue Kléber à Paris ; enveloppe. Extraordinaire et longue lettre sur Napoléon, le cinéma, l'histoire de la pensée, la société... « Bien cher ami, trop de pensées se pressent en foule dans mon esprit. "Milliers d'oiseaux d'or, ô future vigueur" dit Rimbaud [citation approximative du « Bateau ivre »] – pour que je puisse leur ouvrir la cage, et cette lettre ne vous apportera de moi qu'un lointain bruit d'aile. Mais aussi, depuis que je fais du cinéma, les mots n'obéissent plus chez moi à la loi d'attraction qui les attirait sur le papier. Tout cela pour vous apprendre que je voudrais vous dire mille choses mais que mon style est en grève. Et cependant, sous l'emprise d'une violente émotion intellectuelle provoquée à nouveau par une seconde lecture de votre Napoléon [publié par Élie Faure en 1921], j'aurais aimé sertir ma pensée entre des mots pour qu'elle vous apporte autre chose qu'une sensation de force aveugle. Je ne le ferai pas aujourd'hui, je le répète, car il y a aussi en moi trop de fatigue, et trop de grands abîmes bleus pour que je puisse canaliser cette force dans le monde des idées précises. Si je pouvais vous écrire avec de la musique, ou des actes, que ne vous dirais-je pas ? Je travaille à la fin de l'épopée "De Waterloo à Sainte-Hélène". J'essaie de construire, avec ce thème magnifique, une symphonie visuelle dans l'esprit de ce que vous avez aimé de mon premier travail, mais les yeux sont encore si loin de moi que je crains de tomber à force de me pencher vers tous les publics du monde, aveugles naïfs qui ne savent pas encore épeler les étoiles. Donc, depuis un mois, de Thiers à Madelin, de Marco St-Hilaire à Masson, de Gourgaud à Chateaubriand, d'O'Meara à Stendhal, de Walter Scott à Ludwig, d'Henry Houssaye à Aldanov, de Lord Rosebery à Léon Bloy, de Carlyle à Élie Faure, je plonge dans des océans d'histoire et je reviens à la surface à chaque fois avec une gerbe d'étincelles. Avec votre Napoléon : c'est du feu que je rapporte du fond de l'histoire. Aidé du triple écran, je crois faire là quelque chose de bien si mon enthousiasme n'est pas freiné en cours de route. Il n'y a en effet que ce sentiment pour allumer les autres, c'est la bougie des moteurs, hélas bien rare à notre époque de valérysme. Mais nous manquons de respiration morale, il y a de la tuberculose psychologique partout autour de nous, et nous en sommes en partie atteints. Les grands problèmes ne se présentent plus par le pôle "sensibilité", mais seulement par le pôle "intelligence" : s'ils perdent à ce départ toute leur propulsion où la sensibilité crée l'aile, l'intelligence ne crée que l'avion ! Rien de définitif ne se construira en Europe si un grand orage ne réveille pas les sensibilités assoupies, et orage ne veut pas dire cataclysme, mais modification brusque de l'atmosphère des esprits par apports nouveaux & inconnus. Le cinéma est un de ces apports : n'êtes-vous pas de mon avis ? Je me fais l'effet d'un fauve en cage en vous disant ces quelques paroles brumeuses en hâte et à bâton rompu, je sens ce qu'il faudrait penser, mais je n'ai pas la force physique ni le courage moral et je reste immobile et désemparé sur mon radeau à côté d'un Eldorado... De ce point de vue, la politique actuelle m'apparaît mesquine et asthmatique. On ne voit que les petits dangers, pas les grands. L'Amérique et la Russie n'interviennent qu'accessoirement alors que c'est de ces peuples qu'il faudrait s'inquiéter un peu... etc. Entraîné fort loin en arrière par les grands courants d'idées de la Révolution, j'ai été amené ces derniers temps à examiner de près l'évolution de la pensée : depuis le Xe siècle à travers la philosophie médiévale de Thomas d'Aquin, Averroès, Siger de Brabant, Roger Bacon, Raymond Lulle, Guillaume d'Occam & quelques autres. Je suis après parvenu à Baruch Spinoza & Descartes jusqu'à Laplace

Auction archive: Lot number 52
Auction:
Datum:
30 Oct 2017
Auction house:
Alde
1 rue de Fleurus
75006 Paris
France
contact@alde.fr
+ 33 (0)1 45 49 09 24
+ 33 (0)1 45490930
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GANCE (Abel). Lettre autographe signée à Élie Faure. Beauvallon (Var), 20 septembre 1927. 4 pp. in‑folio, bas de page imprimé à son adresse de l'avenue Kléber à Paris ; enveloppe. Extraordinaire et longue lettre sur Napoléon, le cinéma, l'histoire de la pensée, la société... « Bien cher ami, trop de pensées se pressent en foule dans mon esprit. "Milliers d'oiseaux d'or, ô future vigueur" dit Rimbaud [citation approximative du « Bateau ivre »] – pour que je puisse leur ouvrir la cage, et cette lettre ne vous apportera de moi qu'un lointain bruit d'aile. Mais aussi, depuis que je fais du cinéma, les mots n'obéissent plus chez moi à la loi d'attraction qui les attirait sur le papier. Tout cela pour vous apprendre que je voudrais vous dire mille choses mais que mon style est en grève. Et cependant, sous l'emprise d'une violente émotion intellectuelle provoquée à nouveau par une seconde lecture de votre Napoléon [publié par Élie Faure en 1921], j'aurais aimé sertir ma pensée entre des mots pour qu'elle vous apporte autre chose qu'une sensation de force aveugle. Je ne le ferai pas aujourd'hui, je le répète, car il y a aussi en moi trop de fatigue, et trop de grands abîmes bleus pour que je puisse canaliser cette force dans le monde des idées précises. Si je pouvais vous écrire avec de la musique, ou des actes, que ne vous dirais-je pas ? Je travaille à la fin de l'épopée "De Waterloo à Sainte-Hélène". J'essaie de construire, avec ce thème magnifique, une symphonie visuelle dans l'esprit de ce que vous avez aimé de mon premier travail, mais les yeux sont encore si loin de moi que je crains de tomber à force de me pencher vers tous les publics du monde, aveugles naïfs qui ne savent pas encore épeler les étoiles. Donc, depuis un mois, de Thiers à Madelin, de Marco St-Hilaire à Masson, de Gourgaud à Chateaubriand, d'O'Meara à Stendhal, de Walter Scott à Ludwig, d'Henry Houssaye à Aldanov, de Lord Rosebery à Léon Bloy, de Carlyle à Élie Faure, je plonge dans des océans d'histoire et je reviens à la surface à chaque fois avec une gerbe d'étincelles. Avec votre Napoléon : c'est du feu que je rapporte du fond de l'histoire. Aidé du triple écran, je crois faire là quelque chose de bien si mon enthousiasme n'est pas freiné en cours de route. Il n'y a en effet que ce sentiment pour allumer les autres, c'est la bougie des moteurs, hélas bien rare à notre époque de valérysme. Mais nous manquons de respiration morale, il y a de la tuberculose psychologique partout autour de nous, et nous en sommes en partie atteints. Les grands problèmes ne se présentent plus par le pôle "sensibilité", mais seulement par le pôle "intelligence" : s'ils perdent à ce départ toute leur propulsion où la sensibilité crée l'aile, l'intelligence ne crée que l'avion ! Rien de définitif ne se construira en Europe si un grand orage ne réveille pas les sensibilités assoupies, et orage ne veut pas dire cataclysme, mais modification brusque de l'atmosphère des esprits par apports nouveaux & inconnus. Le cinéma est un de ces apports : n'êtes-vous pas de mon avis ? Je me fais l'effet d'un fauve en cage en vous disant ces quelques paroles brumeuses en hâte et à bâton rompu, je sens ce qu'il faudrait penser, mais je n'ai pas la force physique ni le courage moral et je reste immobile et désemparé sur mon radeau à côté d'un Eldorado... De ce point de vue, la politique actuelle m'apparaît mesquine et asthmatique. On ne voit que les petits dangers, pas les grands. L'Amérique et la Russie n'interviennent qu'accessoirement alors que c'est de ces peuples qu'il faudrait s'inquiéter un peu... etc. Entraîné fort loin en arrière par les grands courants d'idées de la Révolution, j'ai été amené ces derniers temps à examiner de près l'évolution de la pensée : depuis le Xe siècle à travers la philosophie médiévale de Thomas d'Aquin, Averroès, Siger de Brabant, Roger Bacon, Raymond Lulle, Guillaume d'Occam & quelques autres. Je suis après parvenu à Baruch Spinoza & Descartes jusqu'à Laplace

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