Premium pages left without account:

Auction archive: Lot number 138

Emmanuel BERL (1892-1976)

Estimate
€1,000 - €1,500
ca. US$1,373 - US$2,059
Price realised:
n. a.
Auction archive: Lot number 138

Emmanuel BERL (1892-1976)

Estimate
€1,000 - €1,500
ca. US$1,373 - US$2,059
Price realised:
n. a.
Beschreibung:

Manuscrit autographe, Drieu La Rochelle, [1954]; 18 pages et demie d'un cahier in-4 à spirale, couverture cartonnée rouge brique. Souvenirs sur son ami Pierre Drieu La Rochelle, neuf ans après sa mort, premier jet, avec ratures, corrections et béquets, du chapitre qu'il lui consacrera dans Présence des morts (1956).{CR} L'écrivain revient sur leur rencontre, leurs divergences de points de vue, puis la brouille qui les sépara. Jalonné d'éléments biographiques, d'anecdotes sur le parcours et les rencontres de Drieu, jusqu'à son suicide, ce récit évoque longuement le poids de son absence...{CR} «Il y a des souvenirs - et ce sont d'ailleurs les plus nombreux, qui, sans devenir immuables comme celui de Mademoiselle Juliette - lui opposent une résistance que le souvenir de Marguerite Grumbach ne lui oppose pas. Ils changent, avec les circonstances et les humeurs; mais ils gardent quand même des contours, une épaisseur que je ne peux pas leur retirer. Venise peut m'apparaître grise, sous un ciel brouillé; je revois le petit salon de l'hôtel Danieli, pareil à un salon de paquebot - et le fauteuil de cuir dans lequel je me recroqueville; les châles noirs des vénitiennes ajoutent encore à la tristesse entre l'eau qui coule et la pluie qui tombe. Et je peux me rappeler aussi une Venise, pâmée de chaleur; le soleil est si fort qu'une fois installé au café Florian, il me semble impossible d'en bouger. [...] Mais, étincelante ou terne, Venise reste liée pour moi à une solitude éblouie, qui me remonte à la gorge dès que je me la rappelle [...] À Proust, elle semble avant tout marine. [...] De même il y a des morts qui ne deviennent ni des gisants ni des elfes, et ne passent ni à l'état de statue, ni à l'état de vapeur. Mes rapports avec Drieu, par exemple, restent déconcertants et instables, comme quand il écrit. Voici neuf ans déjà qu'il s'est tué. Bien avant sa mort, je croyais notre amitié morte. Nous avions cessé de nous voir; plus exactement, il avait cessé de me voir. Je m'en étais chagriné, mais pas étonné. Il disait toujours qu'il ne supportait personne longtemps. Il avait déclaré à Gide - qui le rapporte - n'avoir pas poussé plus de dix mois une amitié, ni une amour. C'était d'ailleurs faux; mais il arrivait à le faire croire, même à ceux qui savaient que c'était faux. En fait d'ailleurs, notre rupture se produisit par accident, non par épuisement. Quand il publia Rêveuse bourgeoisie, j'avais critiqué son titre [...] C'était facile sans doute, ce n'était pas très méchant; bien des fois nous nous étions dit des vérités plus dures. Mais quand, à quelques jours de là, il se planta devant moi, raide comme au garde à vous, blanc de rage, ses yeux pleins de haine, et qu'il me dit "C'est fini ! Je ne te pardonnerai jamais !", je pensai "C'est une crise, elle passera vite". Il fallut bien constater qu'elle ne passait pas. Je crus alors lui avoir fourni, et maladroitement, un prétexte pour une rupture, décidée depuis longtemps. Il reste vrai qu'à cette époque, Drieu se séparait de tous et que tout, de plus en plus, nous séparait»... Etc

Auction archive: Lot number 138
Auction:
Datum:
20 May 2014
Auction house:
La Maison de Vente Ader
3, rue Favart
75002 Paris
France
contact@ader-paris.fr
+33 (0)1 53407710
+33 (0)1 53407720
Beschreibung:

Manuscrit autographe, Drieu La Rochelle, [1954]; 18 pages et demie d'un cahier in-4 à spirale, couverture cartonnée rouge brique. Souvenirs sur son ami Pierre Drieu La Rochelle, neuf ans après sa mort, premier jet, avec ratures, corrections et béquets, du chapitre qu'il lui consacrera dans Présence des morts (1956).{CR} L'écrivain revient sur leur rencontre, leurs divergences de points de vue, puis la brouille qui les sépara. Jalonné d'éléments biographiques, d'anecdotes sur le parcours et les rencontres de Drieu, jusqu'à son suicide, ce récit évoque longuement le poids de son absence...{CR} «Il y a des souvenirs - et ce sont d'ailleurs les plus nombreux, qui, sans devenir immuables comme celui de Mademoiselle Juliette - lui opposent une résistance que le souvenir de Marguerite Grumbach ne lui oppose pas. Ils changent, avec les circonstances et les humeurs; mais ils gardent quand même des contours, une épaisseur que je ne peux pas leur retirer. Venise peut m'apparaître grise, sous un ciel brouillé; je revois le petit salon de l'hôtel Danieli, pareil à un salon de paquebot - et le fauteuil de cuir dans lequel je me recroqueville; les châles noirs des vénitiennes ajoutent encore à la tristesse entre l'eau qui coule et la pluie qui tombe. Et je peux me rappeler aussi une Venise, pâmée de chaleur; le soleil est si fort qu'une fois installé au café Florian, il me semble impossible d'en bouger. [...] Mais, étincelante ou terne, Venise reste liée pour moi à une solitude éblouie, qui me remonte à la gorge dès que je me la rappelle [...] À Proust, elle semble avant tout marine. [...] De même il y a des morts qui ne deviennent ni des gisants ni des elfes, et ne passent ni à l'état de statue, ni à l'état de vapeur. Mes rapports avec Drieu, par exemple, restent déconcertants et instables, comme quand il écrit. Voici neuf ans déjà qu'il s'est tué. Bien avant sa mort, je croyais notre amitié morte. Nous avions cessé de nous voir; plus exactement, il avait cessé de me voir. Je m'en étais chagriné, mais pas étonné. Il disait toujours qu'il ne supportait personne longtemps. Il avait déclaré à Gide - qui le rapporte - n'avoir pas poussé plus de dix mois une amitié, ni une amour. C'était d'ailleurs faux; mais il arrivait à le faire croire, même à ceux qui savaient que c'était faux. En fait d'ailleurs, notre rupture se produisit par accident, non par épuisement. Quand il publia Rêveuse bourgeoisie, j'avais critiqué son titre [...] C'était facile sans doute, ce n'était pas très méchant; bien des fois nous nous étions dit des vérités plus dures. Mais quand, à quelques jours de là, il se planta devant moi, raide comme au garde à vous, blanc de rage, ses yeux pleins de haine, et qu'il me dit "C'est fini ! Je ne te pardonnerai jamais !", je pensai "C'est une crise, elle passera vite". Il fallut bien constater qu'elle ne passait pas. Je crus alors lui avoir fourni, et maladroitement, un prétexte pour une rupture, décidée depuis longtemps. Il reste vrai qu'à cette époque, Drieu se séparait de tous et que tout, de plus en plus, nous séparait»... Etc

Auction archive: Lot number 138
Auction:
Datum:
20 May 2014
Auction house:
La Maison de Vente Ader
3, rue Favart
75002 Paris
France
contact@ader-paris.fr
+33 (0)1 53407710
+33 (0)1 53407720
Try LotSearch

Try LotSearch and its premium features for 7 days - without any costs!

  • Search lots and bid
  • Price database and artist analysis
  • Alerts for your searches
Create an alert now!

Be notified automatically about new items in upcoming auctions.

Create an alert